50e anniversaire de la Révolution des Œillets : faire vivre les valeurs d’Avril !

Publié le 24 avril 2024

Le 25 avril prochain marquera le 50e anniversaire de la Révolution des Œillets au Portugal qui renversa la dictature fasciste qui opprimait le pays, ainsi que les peuples colonisés, depuis 48 ans.

Cette révolution ne signifie pas seulement la fin du fascisme. Ce fut aussi une remise en cause populaire du système d’accumulation capitaliste et d’exploitation impérialiste dont la dictature fasciste était l’outil politique, dans la situation de semi-dépendance dans laquelle celle-ci maintenait le Portugal. C’est-à-dire une exploitation impérialiste féroce des colonies par un système de travail forcé généralisé d’une part, et d’autre part le fait que ce système d’exploitation permettait à la dictature d’être au service des entreprises monopolistes des métropoles impérialistes. C’est donc un système d’exploitation global qui est remis en cause par les luttes anticoloniales tout d’abord, puis par la révolution de 1974.

Ce fut une révolution anti-impérialiste et anticoloniale, qui mit fin aux guerres coloniales, en reconnaissant le droit à l’autodétermination et à l’indépendance des peuples colonisés d’Afrique, avec notamment ce que représentait Amilcar Cabral. Dirigeant du Parti africain de l’indépendance de Guinée-Bissau et du Cap Vert, marxiste convaincu, il s’est battu pendant plus de 25 ans pour l’indépendance de son pays.

Ce fut une intervention populaire pour la démocratie, ce fut une intervention ouvrière pour de nouveaux droits, pour le salaire minimum, pour la dignité dans le travail, pour le contrôle démocratique de la production.

Cette révolution ne fut pas acceptée par les classes dirigeantes, portugaises et européennes. Elle fut l’objet de batailles politiques et sociales intenses. Le processus mis en œuvre par la révolution d’Avril, ses premières décisions et acquis progressistes se sont heurtés à l’offensive et aux tentatives de la droite de vouloir mettre en cause l’ensemble du processus révolutionnaire pouvant conduire à ce que nos camarades du Parti communiste portugais (PCP) souhaitaient, à savoir l’instauration d’une « démocratie avancée » dans des conditions inédites au Portugal.

Ce fut aussi le cas lors des batailles pour l’adoption de la Constitution portugaise. Le texte constitutionnel prévoyait l’instauration d’un régime social et démocratique au Portugal, en incluant la nationalisation des secteurs clés de l’économie, la réforme agraire, la reconnaissance d’un vaste ensemble de droits sociaux en faveur des travailleurs dans les domaines de la santé, l’éducation, la sécurité sociale, la culture. Même si, comme le disent nos camarades du PCP, la Constitution d’Avril a été, pour une part importante, vidée de son contenu transformateur, après des décennies d’application de politiques de droite et néolibérales inscrites notamment dans les traités européens, elle n’en reste pas moins un référent pour les travailleurs et le peuple portugais, garantissant encore d’importants droits politiques, économiques et sociaux.

Ce fut enfin une manifestation de solidarité concrète entre les peuples français et portugais et singulièrement entre le PCF et le Parti communiste portugais. Elle se manifesta dans l’aide concrète apportée aux militants et dirigeants communistes portugais contraints à l’exil, à l’image d’Alvaro Cunhal, qui se réfugia en France après l’évasion collective de la prison de Peniche. Ce fut également la lutte pour assurer des conditions d’accueil, de logement et de travail décentes aux dizaines de milliers de travailleurs portugais qui arrivèrent en France à partir des années 1960. Les municipalités communistes ont été au premier rang de ces combats, à l’image de celle de Champigny et de son maire Louis Talamoni.

Alors que l’extrême droite prétend au pouvoir, le fait de faire vivre les valeurs d’Avril est un enjeu et une nécessité au Portugal, en France et dans l’ensemble des pays d’Europe. Cela implique une politique de paix, une politique de souveraineté démocratique des peuples, une politique sociale. C’est la bataille centrale du moment, pour reconstruire l’espoir et des nouvelles majorités populaires. L’anniversaire de la Révolution des Œillets n’est pas uniquement un enjeu mémoriel, qui est important en soi alors que les bourgeoisies cherchent à effacer cette mémoire de luttes ; il s’agit également d’un enjeu politique pour aujourd’hui et pour demain.

Pour évoquer toutes ces questions, le PCF a organisé ces derniers jours une série de rencontres avec Albano Nunes, dirigeant du Parti communiste portugais, acteur de la lutte contre le fascisme et de la Révolution. Divers débats ont été organisés, notamment dans le 20e arrondissement de Paris et à Champigny. Les 25 et 26 avril, une délégation du PCF se rendra au Portugal pour participer à la manifestation populaire. Y participeront Denis Öztorun, maire de Bonneuil, et Pierre Garzon, maire de Villejuif. Le 26 avril, Sébastien Laborde prendra part à un débat sur la lutte contre l’extrême droite organisé par l’Association portugaise antifasciste. Ce seront des moments importants de solidarité internationale.

Vincent Boulet

membre du CEN chargé de l’international

Article publié dans CommunisteS, n°993, 24 avril 2024.